Sélection du chien de Montagne des Pyrénées
Le travail du Hogan des Vents


Le dicton du jour : "Uste ukaitea ez da jakitea"
(Opinion n'est pas science)



Un Chien de Montagne des Pyrénées authentique, c’est un chien rustique qui a conservé son aptitude naturelle à la protection des troupeaux. C’est d’abord et avant tout un chien de travail issu d’une longue sélection pastorale.

Ce type de chien a été créé par les bergers pour cette fonction bien précise. Et c’est de la fonction que découlent encore de nos jours l’apparence et le tempérament des Montagne des Pyrénées, même si cela devient de plus en plus discutable. C’est donc sans discussion aucune le travail qui est à l’origine du Montagne des Pyrénées. De fait sa sélection et sa préservation ne peuvent être pertinentes que dans le contexte du travail au troupeau.

Le standard officiel qui date de 1923 n’est pas l’origine du Montagne des Pyrénées. Il est le résultat d’une démarche intellectuelle menée par des érudits et des notables. Les bergers n’ont probablement jamais été consultés sur le sujet. S’il est intéressant d’avoir des garde fous quant à la morphologie de nos chiens, ce standard ne devrait pas pour autant être utilisé comme un carcan. Le travail avec le Vivant demande de la souplesse, pas de la rigidité.

Un Montagne doit avoir du caractère pour faire face à un loup ou à un ours. Mais pas seulement, l’authenticité passe également par la rusticité. Dans le monde actuel un chien de protection est une combinaison entre une génétique et une éducation donnée par l’humain. D’ailleurs la complicité entre les bergers et leurs chiens, qu’ils soient de conduite ou de protection, est une évidence pour qui s’intéresse sérieusement au pastoralisme. Malheureusement le bon sens paysan a déserté depuis bien longtemps le monde canin et ce sont les chiens qui en font les frais.

La rusticité c’est : 

  • un chien, protégé par une fourrure ne nécessitant pas d’intervention humaine ;
  • une bonne dentition pour se défendre des attaques des prédateurs
  • un chien capable de travailler sous la pluie et dans le mauvais temps pendant plusieurs jours d’affilé (tout comme son berger je le précise) ;
  • un mâle qui saillit naturellement en respectant la chienne ;
  • des chiennes capables de saillir, mettre bas et d’assurer la survie de leurs chiots sans assistance humaine.

Les Chien de Montagne actuels sont-ils encore rustiques ? C’est la question que tous les éleveurs de ces merveilleux chiens devraient se poser.

Quand j’ouvre la gueule de mes Montagne et que je la compare avec celle de mes Kangal, je vois une différence énorme au désavantage du Montagne. Avez-vous déjà regardé la dentition d’un loup ? Ouvrez la gueule de vos chiens et faites la comparaison … Il y a un sacré travail de sélection à réaliser ...

De ce que j’ai appris de ma propre histoire, c’est qu’il faut au moins 10 ans pour comprendre le travail des chiens de protection y compris en vivant avec eux 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24. Je ne compte plus le nombre de fois où j’ai mal interprété le comportement de mes chiens en raison de mon ignorance de l’époque.

Comme je l’ai écrit dans mon protocole d’éducation : le chien de protection c’est un Savoir Faire & Un Savoir Etre, un très long apprentissage, tant pour l’humain que pour le chien.

Et concernant l’élevage lui-même j’ai compris qu’il faut mettre au monde au moins quatre chiennes pour en sortir une seule bonne reproductrice avec les qualités nécessaires à la perpétuation de la population. Il n’y a pas de sélection sans pression de sélection. Et la pression de sélection c’est choisir les meilleurs individus parmi un très grand nombre.

Le Hogan des Vents c’est un élevage de Chien de Montagne des Pyrénées mais aussi un lieu de recherche et d’expérimentation sur les chiens de protection. Depuis 40 ans je me consacre avec passion à l’élevage des animaux domestiques. Ma spécialisation dans les chiens de protection est arrivée après ma carrière de chercheur, professeur et consultant réalisée dans l’élevage des ruminants (ovins, caprins et bovins) et la luzerne, même si à l’époque je m’intéressais déjà à ces protecteurs de troupeaux.



Le terme de « race pure » est une hérésie scientifique.
Le terme juste en génétique est « population ».



J’ai produit des chiots partis pour la plupart au travail sur troupeau mais aussi comme chiens de compagnie dans des familles. Même si je ne participe à aucune exposition canine depuis bien longtemps et ne fais aucun test génétique sur mes chiens (Cf. mes articles sur ces sujets) leur qualité est reconnue. Je travaille la sélection de mes chiens comme les bergers l’ont toujours pratiquée avec l’efficacité au troupeau comme premier critère de sélection.

Issus de cette sélection pastorale pour laquelle l’efficacité au travail est le seul test valide, mes chiens sont présents dans toute la France métropolitaine, en Corse et sur l’île de la Réunion, mais aussi en Suisse, en Belgique, en Italie, en Espagne, en Allemagne, en Angleterre, en Irlande, en Hollande, en Finlande, en Norvège, aux Etats Unis, en Russie et en République tchèque.

Depuis de nombreuses années mes écrits rassemblent ma pensée concernant l’élevage des Chien de Montagne des Pyrénées authentiques dans le sens où ils doivent être capables de remplir leur fonction ancestrale de protecteurs de troupeaux.

Ils ne sont jamais définitifs mais sans cesse en évolution avec les nouvelles expériences que je peux vivre avec mes propres chiens, les retours qui me parviennent sur les chiens nés sur ma ferme, et les publications concernant les chiens de protection (articles scientifiques, témoignages, réflexions et interrogations d’éleveurs).

Dans ce cheminement je produis des informations originales. J’ai ainsi démontré qu’il était possible de sélectionner l’aboiement chez le Montagne des Pyrénées et d’obtenir des chiens qui n’aboient qu’à bon escient. L’aboiement n’est pas une fatalité comme certains le laissent entendre. Ne pas le sélectionner conduit d’ailleurs à de nombreux abandons chez les particuliers.

J’ai fait la démonstration que le croisement Montagne des Pyrénées x Kangal donnait des chiens avec d’extraordinaires capacités de travail capables de régénérer la population Kangal en augmentant sa variabilité génétique tout en conservant un phénotype Kangal. Le pool génétique Kangal est en effet très réduit en France.

Tout comme j’ai démontré que le croisement Dogue du Tibet x Kangal pourrait être utilisé pour régénérer la petite population de Dogue du Tibet en France, encore une fois en augmentant sa variabilité génétique.

Les protocoles d’éducation que j’ai développés pour les chiens de travail sur troupeau et les chiens de famille sont le résultat de plus de 20 ans de recherche et d’expérience. Je les mets régulièrement à jour.

Sur mes Bouledogue français j’ai également démontré l’efficacité d’une sélection de chiens bien conduite en inversant totalement la dérive mortifère de l’hypertype. En 15 ans je suis revenu à des chiens beaucoup plus rustiques, en bonne santé et qui se reproduisent de façon naturelle, tout le contraire du Bouledogue français actuel qui court péniblement sur les rings d’exposition et ne sait plus naître que par césarienne … C’est un exploit pour cette race totalement sinistrée. Néanmoins il est évident que la sélection demande beaucoup de temps, plusieurs générations de chiens, et qu’il faut avoir des objectifs bien déterminés.

Sur ce sujet il existe un excellent livre (en anglais) que tous les éleveurs de chiens devraient lire « The Dire Wolf Project – Creating an Extraordinary Dog Breed » de Jennifer Stoeckl.



On ne fait pas de la sélection avec des opinions.
On fait de la sélection avec des chiffres !



La sélection est justement le résultat d’un cheminement continu qui transmet de génération d’éleveurs en génération d’éleveurs un réservoir génétique. C’est ainsi que j’ai moi-même bénéficié de tout le travail de préservation de ces éleveurs qui ont continué à faire naître des chiots Montagne des Pyrénées alors que les chiens disparaissaient des fermes pyrénéenne faute de prédateurs.

Comme je l’ai souvent répété le travail génétique sur une espèce animale ne peut être que le fruit d’une démarche collective. La situation du monde cynophile tel qu’il est aujourd’hui ne permet pas d’envisager cette démarche sur l’espèce canine de façon sereine et sincère.

Je suis un scientifique et en tant que tel ma position est ouverte. Mon travail d’éleveur évolue avec l’expérience et les études et les ouvrages que je consulte régulièrement.

En France un énorme problème est posé par les institutions qui gèrent les populations canines et qui maintiennent une confusion permanente entre :

  • Chien de compagnie et chien d’élevage
  • Chien de travail et chien de compagnie
  • Eleveur amateur et éleveur professionnel
  • Le statut de Vétérinaire et le statut de Zootechnicien

 
Cette confusion et ce mélange des genres génèrent une situation ubuesque qui compromet toute approche scientifique rigoureuse dans la sélection des chiens de travail, mais aussi de compagnie. Je le regrette et malheureusement je ne vois comment cela pourrait évoluer favorablement à court terme … Je prêche dans le désert et j’ai fait mien le proverbe qui dit que nul n’est prophète en son pays. Je sème des graines pour ceux et celles qui me suivront.



« Chaque fois qu’une voix libre s’essaiera de dire, sans prétention, ce qu’elle pense, une armée de chiens de garde de tout poil et de toute couleur aboiera furieusement pour couvrir son écho. »
Albert Camus



Mon travail d’éleveur et de sélectionneur de Chien de Montagne des Pyrénées se décline à ce jour en un ouvrage LE MONTAGNE DES PYRENEES – CHIEN DE PROTECTION DE TROUPEAU (2016) dont je prépare une deuxième édition encore plus étoffée pour 2023, un cours Internet sur l’introduction au troupeau de chiots de protection avec un guide pour les bergers chez AGRILEARN ainsi que 13 articles dont voici la liste avec les liens pour y accéder sur mon site Internet :
 
Chiens de protection des troupeaux : pack complet « vidéos + livre » (2021)
 
Origines et sélection des chiens Montagne des Pyrénées du Hogan des Vents (2021)
 
Programme de sélection du Montagne des Pyrénées à l’élevage du Hogan des Vents (2019)
 
Expérience d’élevage de chiots Montagne des Pyrénées destinés à la protection des troupeaux ou à la compagnie (2012)
 
Evaluation du potentiel de travail de chiots Montagne des Pyrénées destinés à la protection des troupeaux (2011)
 
La création d’une filière de production de chiens de protection Montagne des Pyrénées LOF un enjeu pour le pastoralisme ? (2010)
 
La désinformation et le patou (2014)
 
Le chien de Montagne des Pyrénées : un défi à la science ? (2009)
 
Le patou, chien de protection de troupeau et compagnon du berger, peut-il devenir chien de compagnie ? (2022)
 
Histoire de Diva du Hogan des Vents, chienne Montagne des Pyrénées de compagnie devenue chienne de protection de troupeau (2017)
 
Psychose autour du patou (2011)
 
Première intégration de chiens de protection dans un troupeau : protocole de mise en place de deux chiots de protection. Guide du débutant (2022)

Protocole d’éducation de chiots Montagne des Pyrénées et chiots Kangal destinés à la compagnie – Guide 2022 du débutant – Méthode Hogan des Vents (2022)
 
S’installer comme éleveur (2020)
 
Bonne lecture. Le Montagne des Pyrénées a besoin d’éleveurs soucieux de préserver sa fonctionnalité au troupeau et qui ne tombent pas dans le piège de la technologie et du paraître. Il a besoin d’éleveurs compétents, pas de techniciens à la pointe de tous les tests à la mode. Dans un prochain article j’aborderai cette question essentielle : qui peut donc élever des chiens de protection ?

© Dr Mathieu Mauriès 2022